série commencée en 2009 – 24 x 24 cm – impression pigmentaire
dossier de présentation téléchargeable
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Si les murs pouvaient parler…
Nous entendons par mur un ouvrage de maçonnerie formé de pierres, de briques, de moellons superposés et liés par du mortier ou du ciment. Or, les murs, pris dans cette acceptation, disparaissent dans les villes modernes. Le piéton contemporain voit au pied des buildings des vitres maintenues entre des piliers de béton.
Il faut aller en province pour voir et écouter les murs : ce ne sont pas de simples parois, des surfaces extérieures dépourvues de toute intériorité. Par là, je parle, non pas de l’intérieur des bâtiments, mais de ce que l’homme y projette. Rappelons des murs connus pour leur symbolique forte : mur des Lamentations, des Fédérés, de Berlin, de la Peste.
Ce qui m’intéresse ce sont des murs plus modestes, plus anonymes, loin de tout drame.
Sous l’effet conjoint du temps, des intempéries, du gel, leur mortier s’écaille, s’égrène, sous celui de la pollution il se salit. Des plantes dont les graines emportées par les vents y germent. L’homme y apporte sa part de détériorations, il s’y appuie, y frotte des véhicules, y incise des graffitis. En un mot, une destruction lente et graduelle s’opère, trace de vies minuscules, palimpseste d’un quotidien ordinaire. Leurs histoires sont celles de ces minutes qui défilent, quand rien ne se passe.
Devant ces murs on peut céder à une certaine rêverie, comme je le fais dans la série Chimère. Mais souvent, l’empreinte du temps y est plus forte. Le mur est perçu comme une surface sensible au même titre que la pellicule ou le capteur photographique. Il a retenu le temps : une fresque perdue, une carte effacée, des stigmates de présences surgissent.
La mémoire du mur est devenue le catalyseur de ma propre mémoire, celle de mon être révolu. Elle me ramène, elle nous ramène à notre précarité sur terre.
« Se heurter à un mur » ne voudrait-il pas dire autre chose ?