chimère

2009 – série en cours – 24 x 24 cm – impression pigmentaire

dossier de présentation téléchargeable

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

[…]
« Tout est sensible !  » – Et tout sur ton être est puissant !

Crains dans le mur aveugle un regard qui t’épie
A la matière même un verbe est attaché …
Ne la fais pas servir à quelque usage impie !

Souvent dans l’être obscur habite un Dieu caché ;
Et comme un oeil naissant couvert par ses paupières,
Un pur esprit s’accroît sous l’écorce des pierres !

Nerval – Vers dorés, Les Chimères

Il m’arrive de photographier des murs lépreux en vue d’un travail sur les vanités. En observant de plus près les clichés sur un grand écran, des détails auxquels je n’ai pas prêté attention à la prise de vue se révèlent : « des batailles et des figures aux gestes vifs et d’étranges visages et costumes et une infinité de choses. » comme en parle Léonard de Vinci dans son traité de la peinture.
Sensibilisé à ce phénomène, mes capteurs personnels sont dorénavant mis en alerte à la vue d’une tache vague et indéterminée sur un mur. Cela ne signifie pas que je pars pas à la chasse aux taches. Ce sont elles qui, subrepticement, au cours de pérégrinations, s’imposent à moi.
Avec le recul, je constate que celles qui retiennent mon attention restent souvent peu identifiables mais semblent s’adresser à moi d’une manière amusée, narquoise, menaçante… Présence sans réelle consistance, tantôt gnome, tantôt lutin.
Expérience trouble qui ressemble à une forme de projection personnelle sans l’être complètement car quiconque serait passé là aurait pu matériellement prendre le même cliché. Mais en aurait-il vu l’opportunité, en aurait-il ressenti la nécessité ?
Nous sommes tous à la poursuite de nos propres chimères.

Il ne faudrait pas associer cette expérience à ce que les psychologues nomment paréidolie, à savoir : le cerveau face à des formes aléatoires crée du sens en les assimilant à des formes référencées. Ici les formes vues ne sont ni préalablement connues ni répertoriées. La paréidolie rassure, ramène en un territoire connu. Les chimères à l’inverse ne sont que surprise, saisissement.